Acte I, scène 4
Le grand chêne dans la cour. En bas, un
match de basket.
Alexandre au sommet, sur une branche. Grimpent Valori
et sbire Maurice
A : T’as chopé des nouvelles de
l’administration ?
V : Jean-Paul te dit salut, et espère que tu
garderas le contrôle des p'tits.
A : C’est tout ?!
V : Il craint que le chef crée des
problèmes parce que tu es trop naïf. Les
p'tits ont pas l’habitude de recevoir des ordres
d’un gosse, et le directeur a dit pareil.
A : Ça c’est du dunk, sbire Maurice !
Purée ! Quel jeu de fou.
M : Génial, chef.
A : Ainsi, Môsieur le
délégué, il reste des idiots
à calmer, la directrice et le pion ont fait de
moi le chef de la cour, mais par Eminem, ils
m’ont mis dans les mains une étrange
règle qui fait plus catapulte qu’objet de
mesure. Alors balance, qui c’est ?
V : Je suis délégué, chef, si ce
que je vous dis comme simple messager me fait prendre
des risques ainsi qu’au pion, par ton jugement,
je ne balancerai pas !
A : Ouais, ouais, je te reconnais très
courageux, et tu es le plus sympathique des
délégués que je connais, le seul
que je n’ai pas frappé pour
l’instant en tout cas.
V : Chef, être sympa ne m’appartient pas,
et parmi nous, plus sont cool que rebelles.
A : Alors ?
M : Moi je peux expliquer, si tu veux Alexandre.
A : Vas-y.
M : Le bordel, dans la cour, énerve le pion.
A : Quoi ?
M : Je répète : le bordel dans la cour,
chef. Ce que tu y fais ne risque rien, mais c’est
Lorenzo que le pion veut punir.
A : Sa justice il peut se la mettre… Il
n’a jamais embêté le pion, ni
l’ancien muté pour dépression,
alors pourquoi ?
M : Clément l'a laissé tranquille et un
jour, excité au café, il avait
tagué tous les murs de son bureau. Paul
n’a pas oublié (vu qu’il est dans le
même bureau).
A : Ha ! ha ! ha ! C’est vrai que
c’était génial, mais si ça
l’embête, que fait-il de son fils qui, lui,
tague toute la ville ? Ces graffitis ne sont rien. Moi
je continue d’affirmer que c’était
très drôle, je protège la
créativité et l’initiative,
c’est ce qui fait les génies, et
j’en ai quelques uns autour de moi. Et de tout
façon, graffitis ou pas, le pion fuirait
volontiers son bureau s’il le pouvait.
M : Lorenzo est un cancre, il se moque de tout. Si tu
ne gardes pas comme base de ton
« règne » des sages, des intellos,
comment aux yeux du pion et même du directeur ton
rôle aurait-il de l’importance, de
l’intérêt ? Les autres
l’appellent Lorenzaccio, c’est la
décadence en personne.
A : Calme ! Tu oublies que Renzo est comme un
frère pour moi. Hé Cibo, écoute
ça ! Apparemment Lorenzo énerve le pion,
et ça pose un problème à mon
autorité.
C : L’inspecteur vient de dire pareil.
A : Tu oserais me mettre en colère ? Avoir peur
de Renzo ! Un garçon lâche, flemmard,
peureux, l’ombre d’un maternel en caprice,
un génie sans note. Ha ! ha ! ha ! Je n’ai
pas peur de lui et je me fiche de ce que vous pensez de
mon idiot. J'l’aime bien Renzo, et personne ne le
touchera.
C : Si j’ai peur de lui, ce n’est pas pour
ta cour, ni pour l’école, mais pour toi,
chef.
A : Tu délires, Cibo ! Tu veux savoir un truc,
tout ce que je sais des expulsés, des
collés, et des rebelles, c'est Renzo qui me
l’a dit. Un vrai petit manipulateur, qui se
faufile partout, il est doué l’idiot.
C’est lui qui a trouvé un moyen de parler
avec les gamins de l'autre école. Ouais, certes,
c’est mon passe-partout mais s’il peut
faire du mal, ce n’est pas à moi qu'il en
fera. Tiens regarde-moi ce petit corps tout maigre, ce
lendemain sans nuit. Regarde moi ces yeux
démontés, ces mains squelettiques et
maladives, même pas assez fort pour tenir un
crayon. Ce visage triste qui sourit quelques fois, mais
qui ne sait pas rire.Ça c’est un p'tit
gars qui fait peur ? Tu te moques de lui ! Hé
Renzo viens ici ! C’est sbire Maurice qui veut se
battre !
L : Salut les mecs, potes de mon cousin.
A : Lorenzo écoute ça ! Ça fait
une heure qu’on parle de toi et tu sais la
meilleure !? Mon pote, tu as un rapport écrit et
Maurice a peur de toi, Cibo aussi, et Valori ne veut
même pas parler de toi !
L : Pour qui dangereux ? Pour les bonbons et les
intellos ?
M : Les cousins d’Alexandre peuvent être
idiots et dangereux, comme tous les garçons de
l’école.
L : Tiens je ne t’avais pas vu Maurice, Mais tu
es tout mignon aujourd’hui, ta maman t’a
acheté de nouveaux vêtements ?
M : Ton intelligence est aussi mignonne que mes
fringues !
L : Cousin, quand tu auras fini avec lui, envoie-le
chez les filles car habillé comme ça, il
les fera toutes tomber.
M : Si tu te crois drôle défends toi !
L : Si tu crois que je suis du genre à me
battre, tu t’es gouré.
M : Ton humour est bon, mais viens tâter du
muscle, chacun joue avec ce qu’il a.
V : Devant Alexandre tu veux te battre !
A : Laisse faire, allez Renzo, bats-toi, sors tes
poings de tes poches.
L : Quoi ! Mais t’es fou !
A : Eh bien ! Tu as peur, tu trembles, bouge-toi et
fais honneur à ton cousin, tu es plus vieux que
moi et pourtant je te battrais facilement. Sors tes
poings ! Dans la famille on ne se laisse pas faire, que
tout le monde regarde.
L : T'abuses là.
A : Avant oui, maintenant je suis enragé face
à ta faiblesse. Sors tes poings !
V : Chef, arrête ça, une bagarre dans la
cour, maintenant, ce n’est pas une bonne
idée, surtout que c’est interdit !
A : Tu oses parler après un de mes ordres ?
V : C’était juste pour rire, Maurice
voulait juste faire taire cet idiot.
A : Mais je ris, qui pense que c’est
sérieux cette bagarre ? Mais regarde Renzo, il
tremble, il est pâle, et il va tomber dans
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(Lorenzo tombe).
A : Tu vois, je le savais, la violence lui fait
horreur, il n’a pas juste peur, il en est malade.
M : Crétin, fils de ta mère !
A : Tais-toi Maurice, fais gaffe à ce que tu
dis.
V : Purée le pauvre gosse.
C : T’y crois toi ?
A : Évidemment.
C : Ça me paraît faux.
A : Tu crois que mon cousin prend plaisir à
s’humilier comme ça ? Et le pire
c’est que ce n’est pas la première
fois.
C : C’est balèze.
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