Le samedi 29 mai 1965 est inauguré à Saint-Denis, ville natale de Paul Eluard, un lycée qui portera son nom. Plusieurs allocutions sont successivement prononcées en présence de Cécile Eluard, la fille de Paul et de Gala, en particulier un très beau texte de Louis Aragon sur Paul Eluard.
Photo de droite, de gauche à droite - M. Steib,
proviseur du lycée, M. Jacob, inspecteur
général de l'Instruction publique,
|
Allocution de M. Jacob, Inspecteur Général de l'Instruction Publique
Mesdames, Messieurs,
Monsieur le Recteur Jean Roche avait la très
ferme intention et le très grand désir de
présider lui-même la
cérémonie d'aujourd'hui. Les rigoureux
impératifs d'un emploi du temps dont il n'est
malheureusement pas le maître en ont
décidé pour lui autrement. Et mes
premiers mots seront pour vous dire tout le regret
qu'il éprouve de ne pas pouvoir être
présent ici autrement que par la
pensée.
Parmi les très nombreuses personnalités
dont la présence rehausse cette
cérémonie — elles sont si
nombreuses qu'elles m'excuseront de ne pas les nommer
toutes — il en est deux que M. le Recteur aurait
tenu tout particulièrement à saluer et
à remercier.
La première est Louis Aragon. Il ne pouvait pas
y avoir de plus grand honneur pour le lycée de
Saint-Denis que le privilège qui lui est
accordé aujourd'hui d'accueillir celui dont ont
a pu dire, ces jours-ci, à propos de son dernier
livre, « qu'il est et qu'il restera
l'écrivain, le poète, l'artiste le plus
éblouissant de notre temps ». Lorsque
l'idée nous est venue de demander à M.
Louis Aragon de venir ici aujourd'hui, nous ne nous
sommes pas caché que notre projet pouvait
paraître bien ambitieux. Déranger une
personnalité comme la sienne pour une simple
manifestation universitaire, n'était-ce pas, en
effet, avoir beaucoup d'ambition. Mais il se trouvait
qu'à cette manifestation était intimement
associée la mémoire d'un autre grand
poète : Paul Eluard. C'est ce qui nous a
encouragés à présenter à M.
Aragon notre demande. Qu'il ait bien voulu y
répondre avec tant de spontanéité
et de simplicité, nous lui en avons une
reconnaissance que nous ne saurions trop lui
exprimer. L'autre personnalité que M. le Recteur aurait particulièrement tenu à saluer aujourd'hui est celle de M. le Maire de Saint-Denis. Au témoignage que M. le Recteur Roche vous aurait rendu, permettez-moi, M. le Maire, d'ajouter le mien. Les fonctions d'adjoint au Recteur de Paris que je viens de quitter après les avoir remplies pendant 13 ans m'ont amené à prendre part à la création d'une quantité d'établissements nouveaux implantés, pour la plupart dans la banlieue parisienne. C'est dire que j'ai été amené à prejndre contact avec un assez grand nombre de Municipalités. Il m'est très rarement arrivé de rencontrer un accueil aussi amical et un appui aussi efficace que ceux que nous avons trouvés, mes collaborateurs et moi-même, auprès de la Municipalité de Saint-Denis.
Mes premiers contacts remontent à l'année
1957, date à laquelle fut créé
l'établissement qui devait devenir le
lycée Paul-Eluard. Il fut ouvert sous ta forme
d'une annexe rattachée au lycée
Jacques-Decour, que dirigeait alors Monsieur le
Proviseur Dumas et c'est M. Dumas qui présida,
avec le dévouement le plus attentif, à
cette œuvre. Au cours de sa première
année d'existence, l'annexe de J.-Decour ne
comptait que 120 élèves, logés
dans quelques baraques dont il reste encore des
vestiges. Les débuts furent difficiles, d'autant
plus que les effectifs se mirent rapidement à
croître : 300 élèves en 58, 600 en
59, que nous ne sûmes bientôt plus comment
loger et comment nourrir. C'est alors que nous
pûmes apprécier les services que la
Municipalité de Saint-Denis nous prodigua avec
une ingéniosité admirable et un immense
intérêt pour la tâche que nous
poursuivions en commun. En 1959, s'ouvrent les
chantiers des bâtiments définitifs. C'est
vers cette époque que le lycée passe sous
la direction diligente de Madame Gardère. Elle
est soutenue dans sa tâche par une Association de
Parents d'élèves dont dès le
début, la femme de Monsieur le Maire de
Saint-Denis, Mme Gillot, a été
l'infatigable animatrice. En 1960, une 2e tranche de
travaux débute.
En 1961, la demi-pension est ouverte. Mais c'est alors
que se produit une longue interruption des travaux due
à des difficultés administratives de
toute espèce. Pour les vaincre, il faudra les
efforts tenaces et conjugués de la
Municipalité d'une part, et d'autre part du
très distingué proviseur Monsieur Steib,
qui en 1962, au moment où fut prononcée
l'autonomie de l'établissement, a
succédé à Mme Gardère et
à qui je suis très heureux d'adresser
aujourd'hui l'expression de toute mon estime et de mon
amitié. Où en sommes-nous aujourd'hui ?
La 3e tranche va être livrée en septembre
prochain. Mais tous les problèmes ne sont pas
résolus évidemment. Prévu
initialement pour 1 500 élèves le
lycée Paul-Eluard en compte 2 000. Deux annexes
lui sont rattachées à Epinay et à
Saint-Ouen. Sa population scolaire est certainement
destinée à s'accroître encore et il
est vraisemblable que dans un avenir plus ou moins
lointain la création de plusieurs classes
préparant aux grandes écoles doit
être envisagée. De nouveaux bâtiments seront à construire, de nouveaux crédits devront être dégagés. C'est dire que de nouveaux efforts vont s'imposer. Il reste qu'un grand pas décisif est franchi, le lycée désormais porte un nom, un très grand nom. C'est ce nom que Louis Aragon va célébrer tout à l'heure. Je m'en tiens pour ma part à ces quelques mots et je cède la parole à Monsieur le Conseiller Général Gillot, Maire de Saint- Denis. |
Allocution d'Auguste GILLOT, maire de Saint-Denis
Monsieur le Recteur de l'Académie, C'est avec une bien grande satisfaction que la Municipalité ouvrière de Saint-Denis participe à cette inauguration si longtemps souhaitée. Une grande étape est franchie, je dirai : elle fut longue, elle fut douloureuse. En vérité, notre Lycée a déjà une histoire datant d'un peu plus de 30 ans. En effet, c'est dans l'élection municipale du 5 mai 1935 que, pour la première fois, nous avons posé la nécessité de construire un établissement secondaire à Saint-Denis. Rien ne fut possible avant la dernière guerre de 1939. L'équipe municipale de l'époque, qui se préparait à trahir la France, en collaborant avec l'occupant hitlérien, ne se souciait pas de ce problème. C'est le Conseil Municipal provisoire, issu de l'insurrection victorieuse de la Résistance, en août 1944, qui s'en chargea. Notre première délibération est du 17 décembre 1944. Georges Cogniot s'en servit le 28 mars 1945, à la tribune de l'assemblée consultative et le premier bulletin municipal de la Ville de Saint-Denis, adressé à la population en avril 1945, traite de la question. Pour la construction du Lycée, le Conseil municipal du 16 mai 1947 prit la décision de réserver les terrains au plan d'aménagement, de la Ville. C'est ainsi que nous décidâmes de donner 19111 m2 au Ministère de l'Education Nationale. Mais l'accord de principe, pour la construction, ne fut porté à notre connaissance que le 15 février 1954 et la lettre reçue précisait déjà : « Malheureusement, je ne puis envisager son financement dans le cadre de l'actuel Plan d'Equipement Scolaire. » C'est seulement en 1957 que débuta l'implantation de classes préfabriquées et le Lycée de Saint-Denis commença à fonctionner comme annexe du Lycée Jacques-Decour à Paris. A partir de cette date, ce fut une bataille incessante pour obtenir les crédits permettant de construire la première tranche et la deuxième. La consultation de notre volumineux dossier témoigne que nous avons maintenu un harcèlement permanent sans lequel nous n'aurions rien obtenu.
Que de délibérations renouvelées
du Conseil municipal ! Que de questions écrites
au Préfet et au Ministre ! Que de lettres, de
pétitions, de réunions, de
délégations, d'articles de presse ! Il
fallut aller jusqu'aux manifestations de rues pour se
faire entendre.
Dans ces actions multiples, l'Association des Parents
d'Elèves du Lycée joua un rôle de
premier plan, bien soutenu par le personnel enseignant.
En conséquence, c'est un devoir pour la
Municipalité que de remercier bien
sincèrement tous les artisans de ce premier
succès.
Ensemble, nous avons bien travaillé pour doter
Saint-Denis, ville de 100 000 habitants, d'un
Etablissement du second degré absolument
indispensable pour la jeunsse, qui a soif d'apprendre
afin d'être capable de faire face avec honneur
aux développements continus des sciences et des
techniques de notre temps dont doivent
bénéficier les travailleurs de
France.
Renseignement à tirer de cette période de
lutte, pour le Lycée de Saint-Denis, c'est qu'il
ne faut pas relâcher les efforts.
La vieille formule : « Tout vient à point
à qui sait attendre » ne correspond pas du
tout à la situation ; il faut agir en permanence
dans l'union la plus large.
La troisième tranche de travaux est en cours et
il y a espoir qu'elle soit terminée en octobre
prochain.
Cependant, pour que le Lycée soit
définitivement construit, il faut
également commencer la quatrième tranche
sans désemparer, c'est-à-dire sans
laisser, une fois de plus, fermer le chantier car il en
coûte beaucoup de temps et d'argent pour obtenir
la réouverture.
Notre Lycée doit posséder ses propres
installations sportives pour ses 2.000 lycéens
et lycéennes ; c'est absolument indispensable.
Que se passerait-il si nous ne mettions pas à
leur diposition le Palais Municipal des Sports ?
De plus, le Lycée doit être desservi par
de meilleurs moyens de transports. Des bourses doivent
venir aider les jeunes dont les parents sont en
difficulté et la fonction enseignante doit
être revalorisée, ce qui pose tout le
problème d'une véritable réforme
démocratique de l'enseignement, dont les
éléments directeurs sont contenus dans le
plan Langevin-Wallon.
Telles sont, Mesdames, Messieurs, les quelques
idées que la Municipalité de Saint-Denis
a pensé nécessaire de préciser
à l'occasion de cette inauguration.
Puisque le Lycée portera désormais le nom
glorieux du grand poète national, né
à Saint-Denis, Paul ELUARD, la
Municipalité a décidé de faire don
de son buste, œuvre du sculpteur Françoise
Salmon, ici présente, que je félicite de
sa réussite.
Nous avions acheté ce buste pour le Musée
Municipal, mais il est bien, il est juste que Paul
ELUARD soit à l'entrée du Lycée de
Saint-Denis.
Il rappellera à tous que « Les mots
participent à l'élaboration de la
vérité », et que « la
poésie est contagieuse ».
Dans cet hommage supplémentaire au poète,
nous continuons à faire rayonner sa gloire d'un
magnifique éclat.
Grand merci, cher Louis ARAGON, citoyen d'honneur de
notre Ville, d'être venu apporter votre concours
à cet hommage.
Meilleurs vœux de succès au Lycée
de Saint-Denis. VIVE LE LYCEE PAUL-ELUARD ! |
Hommage de Louis ARAGON à Paul ELUARD
Ma chère Cécile,
Il ne m'échappe point que c'est un grand honneur
qui m'échoit d'avoir à parler ici pour le
baptême du Lycée Paul-Eluard de
Saint-Denis. Je ne puis que remercier ceux-là
qui eurent la pensée de faire appel à
moi. Mais il me faut bien convenir qu'on ne pouvait
plus mal choisir. Il n'y a pas la plus petite chance
que je dise ce qu'il faut, et que sans doute on attend
de moi. Je devrais apparemment ici parler de Paul
Eluard, comme il serait possible à quelqu'un
d'autre, de façon tout exemplaire, en dresser
une statue verbale, donner à rêver, sinon
à voir, à ces jeunes gens qu'on y
élèvera, en leur présentant le
personnage idéal qui va se trouver
présider à leurs études. Etc.
Enfin ajouter à cette « morale en action
» du XIXe siècle un chapitre contemporain,
l'image d'un ami que j'ai eu, tel qu'en quelque autre
enfin, l'Education Nationale va le changer. Je
comprends l'utilité de ce merveilleux Epinal. Je
ne saurais pourtant y contribuer.
Paul Eluard est désormais pour tous un grand
poète au sens qu'on prête à ces
mots, et rien d'autre. Il a quitté son visage
humain pour une figure immortelle. On apprend, on
commente ses vers, on se met même à les
comprendre. Et cela est fort beau pour les autres. Mais
n'ai-je pas été témoin de sa vie
pendant trente-trois années ou presque ? Et je
n'ai pas le goût de mentir, même pour le
bon motif. D'ailleurs, il me faut bien vous avouer que
ma morale à moi n'est peut-être pas tout
à fait académique : je ne crois pas qu'il
faille donner en exemple à la jeunesse
d'édifiants mannequins, j'ai persuasion qu'il
est de notre devoir de lui apprendre d'abord, avant
toute chose à détester l'hypocrisie. Je
ne puis donc vous parler de Paul que comme d'un
être de chair et de sang, car sans le sang et
sans la chair, où donc jamais se serait
logée l'âme, la poésie ? Et la
sienne, il ne faut point, à la lire, des yeux
pudiquement fermés. Qu'y comprendrait-on s'il
était devenu un autre ? Ce chant singulier, qui
va du cri, à lui arraché par le spectacle
des Gertrud Hoffmann girls au Moulin-Rouge,
jusqu'à l'admirable poème qui s'appelle
Corps mémorable,
Ce chant singulier, de quoi voulait-il d'abord
enchanter nos mémoires ? Evidemment, cela peut
se lire du bout des cils. Et dieu sait qu'il ne manque
pas de gens qui lisent comme ils voudraient que la
poésie fût écrite, et ne retiennent
des mots que l'écho de leur murmure appris.
Ceux-là, quand les choses sont à leur
gré trop directement dites, trouvent Eluard
obscur, et s'en tirent ainsi. Mais nous qui l'avons
connu, et difficilement pourrions séparer sa vie
et sa musique... excusez-moi, je ne puis le relire,
celui qui fut la voix profonde d'un peuple à
l'heure du malheur français, tout à fait
comme ceux-là pour lesquels il demeure un
poète abstrait. Et même pour que prennent
tout leur sens ces vers de Poésie et
Vérité 1942 :
il me faut bien qu'ils aient été
prononcés par des lèvres qui ont beaucoup
conjugué le verbe aimer. Pour comprendre,
à mon sens, même un poème qui
semble se contenter de sa signification
d'évidence, comme l'incomparable
Liberté, lequel a passé de la lueur
interdite de la patrie à la calme lumière
des anthologies, pour lui donner sa résonnance
originelle, ne faut-il pas se souvenir de l'homme qui
l'a écrit, de l'homme qu'il a été,
de sa vie réelle, que n'ayant pas ici le temps
de vous dire par le menu, j'ai l'envie de
résumer d'un trait essentiel, d'une phrase par
quoi tout commence, et de quoi tout peut, rêvant,
se déduire : Il a beaucoup aimé les
femmes... excusez-m'en, si c'est cela d'abord en
lui que je trouve vraiment exemplaire.
Paul s'était marié très jeune. Je
n'ai jamais pu lire sans émotion, même
à la millième fois, ses premiers vers,
ceux du Devoir et l'Inquiétude, ou les
Poèmes pour la paix. Ils sont
témoins de cet homme commençant, sa
bonté, sa pureté des sentiments, ce doux
orgueil à dire ma femme ou mon
enfant... Il fallait une bonne dose de
distraction, quelque temps après, aux
surréalistes, pour s'arranger avec cette
poésie-là, ou pour l'oublier, car
à tout prendre je n'ai jamais pu m'expliquer
comment ils s'arrangeaient avec elle. Il est vrai que
cela n'a guère demandé que quatre ou cinq
ans pour que commence à se défaire ce
bonheur initial, et la morale surréaliste
trouvait à ce malheur le bonheur de la
poésie. Il n'en restait pas moins qu'heureux ou
malheureux l'amour avait eu le visage de cette femme
tant de fois, si longtemps nommée, celle dont il
avait pour la première, fois, dit ma
femme. Et j'ai trop souvenir, quels qu'aient pu
être les épisodes suivants de cet amour
à la fin déchiré, d'une phrase que
Paul a dite plusieurs fois devant moi au cours des
années : « Une femme qu'un ami à
moi a aimée m'est pour toujours sacrée
», j'en ai trop souvenir pour oublier que c'est
d'elle,
Que c'est d'elle que tout est parti, que c'est de Gala
que Paul a appris à vivre, à être
lui-même, que c'est d'elle que sont venus
Mourir de ne pas mourir et Capitale de la
Douleur, et bénie soit-elle pour cela ! Il
n'y a pas d'autre école du poète que de
longuement souffrir.
J'ai raconté quelque part, comme cela peut se
raconter, comment en 1926 Paul est parti, sans croire
jamais revenir. Je disais : Le dernier soir, la
dernière nuit, nous les avions passés
ensemble. Ce qu'il m'a dit alors, au juste, je ne l'ai
jamais répété, je ne le
répéterai jamais. Et pas plus
aujourd'hui. Je l'emporterai avec moi dans ma nuit.
Alors, Paul disparu, l'idéalisation consistait
à faire de lui une manière de Rimbaud
dans quelque Ethiopie. C'était dans de petites
revues dont l'initiative donnait à mes amis
d'alors les crampes de prendre l'affaire en main, de
faire de lui leur héros, d'expliquer avec leurs
idées cet inexplicable départ. Il m'avait
fallu pour tenir la promesse que m'avait
arrachée Paul à l'heure de l'aurore,
après cette dernière nuit, me livrer
contre eux à un singulier marchandage, risquant
de rompre entre eux et moi, plus que les ponts, cette
amitié qui me semblait toute ma vie. Entre cet
Eluard de bronze qu'ils eussent gagné, et moi
qu'ils eussent perdu, ils hésitèrent
assez pour que Paul revint sans qu'on en eût fait
ce personnage romantique, dont il avait l'horreur On
suit très peu de ses voyages, assez pourtant
pour que ce temps-là m'apparaisse, non pas
rupture, mais continuité de l'homme qui avait
écrit :
et vers 1929 à jamais lia, dans le titre d'un
livre, ces deux mots L'AMOUR LA POESIE.
J'ai chez moi plusieurs portraits d'Eluard. Ils m'ont
toujours paru incomplets parce qu'il y est seul. Je ne
puis détacher l'image que j'ai de Paul d'une
sorte de nuage qui le suit, variant : et j'y lis comme
dans le ciel ou les dessins de hasard d'un mur ces
visages qui l'accompagnent dans le souvenir, ces doux
et beaux visages qui n'ont pas tous gardé un nom
pour moi, les passantes innombrables comme le petit
nombre des amours. On parle toujours de ces choses avec
une légèreté qui m'est
incompréhensible. Elles sont cependant, les
étapes inégales d'une quête qui fut
à la fois la vie et la poésie de cet
homme aux yeux purs. Et tant pis pour ceux que cela
choque, et qui trouvent sans doute impossible,
impudique le pluriel des Amours, dont personne ne
s'étonne plus s'il s'agit de Ronsard ! Je ne
parle pas ici de ce qui n'est, et j'entends assez
amèrement le sens de cet adjectif, que la vie
privée. Je parle de ce qui, de ces femmes que je
lui ai connues, a passé par osmose dans les vers
d'Eluard. Dans ce temps où nous étions
proches, comme dans ces poèmes des années
où brisure entre nous deux s'était faite,
parce que l'avait emporté en lui l'attachement
que j'avais jeté, moi, naguère, dans la
balance quand il s'agissait d'empêcher qu'on lui
donnât un visage qu'il refusait d'avoir. Et puis
ce fut son tour de choisir....
Pour en arriver-là, il faut en revenir un peu en
arrière, sur ce chemin d'aimer qui fut le
sien.
Cela devait être en 1930. Une femme avait surgi
dans sa vie, qui ne ressemblait à aucune autre
antérieure. J'avais eu, pour la première
fois à la voir, le sentiment étrange que
cette fois c'était pour toujours. Et
c'était pour toujours. Nusch devait amener dans
la vie de Paul non seulement ce grand calme de l'amour
partagé, mais aussi ce climat silencieux qui
allait infléchir le destin de l'homme où
tout d'elle l'appelait. Que Nusch était
d'origine une femme du peuple, et qu'à l'horizon
de toute chose il y avait pour elle des
réalités inoubliables, a joué sur
l'évolution de Paul Eluard de façon
décisive. La crise qui m'avait
éloigné de nos amis, et de Paul
lui-même, en 1931, Eluard devait la
connaître de 1935 à 1938, sous des formes
différentes, et l'influence des
événements, du phénomème
hitlérien, de la guerre d'Espagne, des approches
de 1939. A ceux dont, à son tour, il se
séparait, deux ans après La Victoire
de Guernica, il disait en 1938 dans Cours
Naturel :
Et quand vinrent les heures tragiques il n'était
point seul. J'avais appris à Nice, d'où
commençait pour moi ce travail qui nous prit
entièrement, Eisa et moi, l'évolution
d'Eluard. Je savais que Nusch était, la
première, entrée dans ce parti qui
était le mien. Il ne tarda pas à l'y
suivre. C'est au printemps de 1942 que Paul
adhère au Parti Communiste Français,
c'est-à-dire à l'heure même
où sont fusillés Jacques Decour et
Georges Politzer, il ne faut pas l'oublier, parce que
cela n'est pas hasard, mais courage, que cela
revêt un sens. J'ai lu, dans un texte presque
officiel, il y a quelques mois, avec un certain
étonnement que l'on disait qu'Eluard
était entré au Parti à la
Libération. Je dois dire que de telles «
inexactitudes » renforcent la position d'un
personnage d'Elsa Triolet, dans son dernier roman,
Le Grand Jamais, ce Régis Lalande,
historien qui déclarait qu'il est impossible
d'écrire l'histoire. Qu'Eluard soit un
communiste de la saison sanglante, et non de
l'année où cela fut le plus facile d'en
devenir un, j'estime qu'il est de mon devoir de le
rappeler. C'est à notre premier voyage de Paris
après le débarquement d'Afrique du Nord,
qu'à notre grande et douce surprise, nous
vîmes au portillon du quai, gare de Lyon, Nusch
et Paul qui nous attendaient. Nous ne nous
étions jamais plus revus depuis ma rupture avec
les surréalistes. Nusch nous apportait une
grande tarte qu'elle avait faite pour nous : et je ne
sais pas si vous pouvez comprendre aujourd'hui ce que
cela signifiait en ce temps sans farine et sans sucre.
Nous avons été la manger ensemble dans ce
rez-de- chaussée du boulevard Morland qu'on nous
avait préparé pour nous y cacher. Toute
la vie était, là entre nous, comme ce
gâteau découpé, tant de choses
à se dire, nous quatre, que nous avons
oublié le couvre-feu et que Nusch et Paul sont
restés coucher chez nous, dans cet
étrange chez-nous inconnu. C'était le
temps de l'Honneur des Poètes qui
commençait...
Tout ce qui suivit est trop public que j'aie ici besoin
d'en reparler. Nous avons joué notre partie dans
la guerre de la patrie. Cette fois du Boulevard
Morland, l'aviation britannique, la R.A.F. venait de
jeter sur Paris les poèmes de Paul Eluard et de
moi ; pour moi, je n'étaits pas trouvable, mais
Paul habitait chez lui, à ce bout de la rue de
la Chapelle qui ne s'appelait pas encore rue
Marx-Dormoy. N'empêche, et cette anecdote me
suffira pour parler ici de l'homme... (j'ai
l'apparence d'homme — Pour prouver que le monde
est fait à ma mesure), que dans ce
temps-là qui était celui de la grande
persécution des Juifs, Paul avait inventé
de dire à qui voulait l'entendre qu'il
était juif, et à ceux qui s'en
étonnaient appuyait cette
révélation du fait qu'Eluard
n'était qu'un pseudonyme, son nom de famille
étant Grindel, ce qui bien sûr est un
vieux nom paysan de France, mais à quoi il
donnait un air germanique à le prononcer
Grinedel, on avait même eu toutes les peines du
monde à le dissuader de porter l'étoile
jaune. Il disait couramment que l'on devrait l'envoyer,
lui comme tous les Juifs, à Madagascar, etc. Et
je me souviens qu'en 1942 à Nice, Jean Paulhan,
nous racontant la chose, y croyait dur comme fer
puisque Paul le lui avait dit lui-même. Il avait
fallu l'autorité du Parti pour arrêter
cela, cette bravade et cette
générosité un peu folle, car Paul
voulait toujours être du côté des
plus malheureux. Il n'y avait pas besoin de
l'étoile jaune, à vrai dire, pour prouver
que le monde fût à la mesure d'Eluard.
Mais comme le dit ce poème de plus tard, que je
citais tantôt :
Dans ces années d'après la guerre, il
semble qu'un souffle nouveau s'élève de
cet homme. C'est alors qu'il écrira notamment
Poésie ininterrompue, du temps de
Nusch, Une leçon de morale et le
Phénix du temps de Dominique... pour m'en
tenir à ces « grands ensembles »
comme on dit aujourd'hui des maisons de couleur qui
s'élèvent de la misère humaine. Il
semble qu'on ait oublié, à lire ce qui
s'écrit de la poésie française du
XXe siècle, que c'est Paul Eluard le premier
qui, à contre-courant, tenta de faire
renaître le poème de longue haleine. Cela
demandait, à cette heure de la cinquantaine, une
réinvention du langage, cette réinvention
qu'annonçait dès 1938 un poème, la
même année, publié seul, puis
repris dans Cours Naturel, et qui s'intitulait
: Quelques-uns des mots qui jusqu'ici
m'étaient mystérieusement interdits.
Entre temps, il a passé huit années
d'histoire. Les modes sont oubliées. La
liberté, qu'il était né pour
connaître, s'incarne dans ce parler nouveau,
illimité de Poésie
ininterrompue... Ici se fait pour la
première fois la rupture avec la convention du
poème à ta mesure de l'œil : le
poème se met à la démesure
l'homme.
Mais on ne peut éclairer ceci, s'en tenant aux
textes écrits, et les séparant de la
tragédie de ces années-là. J'ai
quelque hésitation d'en parler. Comme si
c'était indiscret de ma part, quand Paul
cependant... ou Didier, puisqu'il avait choisi ce nom,
comme s'il avait déjà tué Paul
Eluard... Pardonnez-moi. Je m'étais
arrêté d'écrire ceci, à ce
point même des mots, l'autre soir. Je suis
resté toute une nuit les yeux ouverts sur ce
passé. Il faut bien que je le raconte. Et tant
pis pour la phrase commencée !
Paul était malade. Toute sa vie il a
été guetté par les rechutes d'un
mal de sa jeunesse, les poumons, et comme il avait
été dans quelque Davos, au temps
où il connut Gala, les médecins l'avaient
une fois de plus envoyé en Suisse, chercher
l'air de la neige. Nusch était demeurée
à Paris. Qu'y avait-il, deux ou trois jours ?
Qu'elle était venue nous voir, chez nous, rue de
la Sourdière : les nouvelles étaient
meilleures, mais visiblement elle s'impatientait de
cette séparation. Et puis, ce soir-là, le
28 novembre 1946, dans une salle près de la
place Voltaire, j'étais sur l'estrade, parce que
j'avais été élu « Grand
électeur », pour les élections au
Sénat, et j'assistais notre candidat, Jacques
Duclos : pendant qu'il parlait, un de nos camarades du
coin où habitaient Paul et Nusch, le dentiste
Hastoing, me fit parvenir un mol, me demandant à
me parler, quand il me dit, en ces termes, Mme
Eluard est morte, je ne pensai pas un instant
à Nusch, je crus qu'il s'agissait de Gala, dont
Paul était depuis vingt ans
séparé. Il y a des choses difficiles
à comprendre. Quand je balbutiai la nouvelle
à Jacques Duclos, celui-ci me dit seulement :
Vas-y... et me fit donner l'amas énorme des
fleurs qu'on lui avait portées ce
soir-là.
J'arrivai donc dans l'appartement de Mme Grindel
mère, rue Ordener où Nusch dormait seule,
dans le silence, et la grande lumière, et je
jetai sur son lit ces fleurs qui étaient
après tout bien pour elle. L'effrayant
était qu'elle dormait, qu'elle avait presque
meilleure mine que lors de sa visite chez nous, qu'on
s'étonnait de ne pas voir la respiration
soulever son sein... d'ailleurs, à la regarder,
dans ma stupeur, il me sembla... il me sembla...
L'effroyable voyage de retour : Paul n'arriva que le
surlendemain, et dans son égarement il assurait
que Nusch n'était pas morte, il demandait qu'on
ne l'inhumât point, il jurait qu'il l'avait vue
respirer, qu'elle dormait. Ah, devant cela, pour se
défendre, que sont les armes de la douleur
!
Nous avons tremblé pour Paul. Que pouvait-on
faire ? Tout ce qu'il disait trahissait une
résolution dont on se refusait pourtant à
prendre conscience. Il y avait quelque chose de
brisé en lui. Il disait, au moins, qu'il
n'écrirait plus. Il avait commencé une
manière de poème, en Suisse, juste avant
la chose. Cette suite qu'il y donna, avait sans le dire
le caractère d'un testament. Il le signait d'un
nom inventé Didier Desroches, parce qu'il avait
tué Paul Eluard. Je le laissai dire. Ce qu'il
m'avait montré de Didier était d'une
beauté confondante. Ce petit livre qui devait
paraître comme l'œuvre d'un inconnu, c'est
peu en dire qu'à mes yeux il surpasse tout ce
qu'Eluard a signé de son nom. Je le pensais
alors, et je le pense aujourd'hui. Mais ce n'est pas
que Paul qui s'est trouvé porté
au-delà de lui-même : je pense
véritablement que c'est la langue
française. Ici elle aura été
l'instrument inégalable d'une souffrance jamais
ainsi exprimée. J'ai beau chercher dans ce
trésor les paroles qu'ont accumulé les
siècles, je n'y connais rien qui brûle
ainsi. Quand je les lis, ces vers, même muet,
pour moi, de cette voix intérieure, j'en ai la
gorge blessée. Ne dites pas que j'exagère
: qu'avez-vous à y opposer ? Malherbe... Ta
douleur, du Périer... Vous voulez rire. Ce
n'est pas le moment. A Villequier,
peut-être... Peut-être.. Mais faut-il
à tout prix comparer les choses incomparables ?
Le temps déborde de Didier Desroches
devait paraître en juin 1947.
Peu à peu, la vie reprenait. Difficilement. Mal.
Paul ne pouvait pas supporter la la solitude. Il ne la
supporta pas. Et quand il commença à y
avoir autour de lui d'autres femmes, ceux qui s'en
étonnaient ne comprirent sans doute pas le
courage que cela représentait. De leur part.
Fallait-il, pouvaient-elles abandonner cet homme aux
fantômes qui l'entouraient ?
L'aimèrent-elles ? Elles le veillaient,
voilà. Ο consolatrices, l'une surtout,
merci de ce que vous avez fait pour Paul ! A distance,
j'ai de vous un très profond respect.
Enfin, nous le croyions sauvé. Un jour, à
l'improviste, il y avait des mois que Nusch
n'était plus, Paul survint rue de la
Sourdière et. avec une effrayante
tranquillité nous dit, à Elsa et à
moi, je le vois assis devant notre longue table de bois
blanc, les doigts croisés.... que c'était
fini, qu'il ne pouvait décidément pas
survivre, il allait, se tuer, il me priait d'expliquer
sa résolution au Parti. Qu'avons-nous dit ? J'ai
encore dans l'oreille la voix d'Elsa. Mais les mots !
Qu'auriez-vous dit à notre place ? Tout
était si abominablement dérisoire. Tout
d'un coup, je me sentis m'emplir d'une
résolution violente. Je demandai à Eisa,
c'est étrange pour moi maintenant, de nous
laisser seuls. Ce qui n'avait pas grand sens : nous
n'avions que deux pièces, et de la seconde on
entendait chaque mot de ce qui se disait dans l'autre,
surtout que j'étais bien incapable de mesurer ma
voix. Ah, je n'étais plus que violence ! Je ne
reculerais devant rien. J'ai pris mon ami dans les bras
de ma colère. Je lui ai dit, alors,
voilà, voilà, tu nous abandonnes... Non,
pas comme vous croyez ! Il fallait inventer un autre
chantage. Le pire pour moi. Le plus difficile. On sait
assez qu'à l'heure où j'avais perdu tous
mes amis, quinze ou seize ans plus tôt, Eluard
avait signé un texte atroce contre moi. Jamais
nous n'en avions parlé jusqu'à ce
jour-là. Pour quoi faire ? Nous nous
étions retrouvés, c'était
l'essentiel. Mais alors, mais à cette minute, je
le lui jetai au visage, je criais. Tu t'en vas parce
que ça t'arrange, et tu me laisses avec ces mots
jamais démentis, qui vont maintenant me suivre,
avec d'autant plus de force que le fait de se tuer
confère aux paroles des suicidés je ne
sais quelle autorité grotesque... Tu t'en vas.
Tu vas servir contre moi... Mon Dieu ! je
m'écoutais et ne m'écoutais pas. Paul
était blême : Il ne disait rien. Moi, je
ne m'arrêtais plus.. Je lui en ai dit, je lui en
ai dit. Je lui secouais l'âme. A la fin, il m'a
pris la main, et il m'a dit : « Je te promets...
je vais essayer... » Voilà, je vous l'ai
raconté.
J'ai souvenir confus des deux années qui
suivirent, où Paul se jeta dans une
espèce de tourbillon. La passion de servir est
dans ce qu'il écrivit comme dans ce qu'il
fît. Qu'importe le détail... Je n'en
retiendrai que ce voyage en Grèce, avec Forges,
où il fut par des voies secrètes en 1949
visiter l'armée démocratique
hellène au Mont-Grammos, par ce que de cela il
est resté un livre de poèmes
Grèce, ma rose de raison, commencé
là- bas, fini au mois de juin, pour m'en tenir
à la date terminale de l'ensemble, et qui devait
être repris dans Une leçon de
morale. Cette même année, Paul est
envoyé au Mexique par le Mouvement de la Paix.
Ce n'était qu'une étape de cette course
pour ne pas se laisser le temps dangereux de respirer.
Mais il advint là-bas l'imprévisible :
c'est qu'il rencontra Dominique.
A la première fois que nous la vîmes, il
fut clair que Paul était sauvé. Je n'ai
jamais oublié ce sentiment que j'en eus. Et
comme j'ai alors pensé, une fois de plus,
à sa phrase, à lui : Une femme qu'un
ami à moi a aimée m'est pour toujours
sacrée... A Dominique, que je n'ai plus vue
depuis des années, revient cette reconnaissance
des quatre ans qu'elle donna à Eluard, des
quatre ans de vie qui furent encore sa destinée,
et que pourrions-nous, qu'avons-nous le droit d'ajouter
d'elle à ce livre, à ce symbole du
Phénix écrit pour elle, ce
témoignage que par elle Paul renaquit de ses
cendres ?
Pendant les années de Dominique, outre le
Phénix, Paul a publié Pouvoir tout
dire où les pages qui me concernent,
auxquelles je m'excuse de me référer ici,
après tout j'ai le droit d'en avoir
fierté, constituent indiscutablement une
réponse à ce que je lui avais dit ce
jour-là qu'il avait voulu mourir. Les
poèmes de ce temps-là qui furent
réunis après sa mort sous le titre de
Poésie ininterrompue II ne sauraient se
séparer de ce qui les a
précédés, dont ils sont à
la fois le commentaire et le dépassement, En
particulier des Poèmes politiques,
parus en 1948, dont j'avais écrit la
préface. Le dernier poème de Paul, par
quoi se termine Poésie ininterrompue II, Le
Château des Pauvres, a ceci d'admirable
qu'il semble une synthèse des grands courants de
toute sa vie, depuis les premiers jours, et joint
à des vers qui éclairent, comme s'il
avait tenu à le faire avant de
disparaître, des moments distants de sa vie,
à la fois la poésie pour tous et la
poésie pour la femme aimée, pour
Dominique. Je dis la poésie pour
tous... Aux derniers jours, alors qu'il
était tenu à l'immobilité dans son
lit, après un infarctus, Paul m'avait fait venir
pour me parler d'un projet. Il avait fait
lui-même un choix de ses poèmes, comme un
testament poétique, un choix qui va d'un bout
à l'autre de son œuvre, et qui parut
après lui, par les soins de Dominique, et les
miens. C'est ce livre qui s'appelle Poèmes
pour tous, car il ne semble pas que le choix
même que Paul y a fait ait eu d'autre guide que
le souci constant de réunir des poèmes
qui fussent lisibles de tous. Il y avait
essentiellement insisté dans cette
dernière conversation que nous eûmes dans
cette chambre de leur nouvelle maison, au bord du Bois
de Vincennes. Et l'on entendait par la fenêtre
les cris des enfants de l'Ecole, voisine à
l'heure de récréation. Je lui demandai
s'il n'en était pas gêné. «
Moi ? J'adore cela ! » Tous, dans son esprit,
c'étaient aussi ces enfants tapageurs. L'avenir.
Nous étions à la mi-novembre de 1952, ou
à peu près. Il est mort subitement, je ne sais, deux ou trois jours plus tard. Je ne parlerai pas de sa mort. Je ne parlerai plus jamais de sa mort. Je parle encore une fois de sa vie. J'étais venu ici pour parler de sa vie. De notre vie. De ce que je sais encore de notre vie. |
Louis Aragon et le maire de Saint-Denis, Auguste Gillot - Musée d'art et d'histoire - Saint-Denis © Douzenel |
© Musée d'art et d'histoire - Saint-Denis ©
Douzenel pour les images.
Un merci chaleureux à Lucile Chastre, Elsa Tilly et
Lionel Labosse.
Et pour prolonger
- Le site du lycée Paul-Eluard de Saint-Denis
- Plaquette complète de la cérémonie
- Aragon parle de Paul Eluard
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Ce discours a été récemment édité en Cd audio. Aragon parle de Paul Éluard. CD co-produit par PSD (121, rue Gabriel Péri. 93200 Saint-Denis) et Maison Elsa Triolet/Aragon (Moulin de Villeneuve. 78730 Saint-Arnoult-en-Yvelines). Prix : 15 € (plus frais de port). (Sur commande à la Maison Elsa Triolet/Aragon). |